Désapprendre est difficile. Par désapprendre, il faut comprendre oublier un savoir de manière intentionnelle afin de le remplacer, souvent, par un autre savoir, plus actuel et pertinent.

Bon …j’ai parfois des lubies. Le désapprentissage en est une. Je voulais savoir à tout prix comment on fait pour désapprendre. J’en suis arrivé à une théorie exposée là. Tu me diras ce que tu en penses.

Désapprendre des croyances plutôt que des savoirs

Désapprendre des savoirs c’est plutôt simple. C’est surtout désapprendre des croyances qui est difficile.

Voilà, c’est dit !

En réalité, il arrive à un certain point où ce que nous prenons pour des savoirs sont en fait des croyances. C’est la pire chose qui soit pour l’enseignement :

Faire passer des croyances pour des savoirs.

La croyance n’est pas un savoir. Considérer comme vérité ou vraie une thèse ou hypothèse en étant hermétique aux faits ou à l’absence de faits, les confirmant ou infirmant, voilà la définition d’une croyance.

En cela, elle s’oppose à l’esprit critique. Cette dernière, remet en question tous les savoirs, quels qu’ils soient. La croyance, par contre, voudrait les voir et les rendre comme immuables et indiscutables.

BOOM

Y avais-tu déjà songé ? Maintenant, tu sais pourquoi la morale ou le religieux peuvent devenir un frein à la science. Cette dernière se trouve parfois clouée, sans possibilité de se mouvoir et de progresser surtout. Je fais un gros raccourci ici tout de même.

Mais là, je ne vais pas discuter ce point.

Avec ce constat, les croyances sont donc des obstacles naturels aux savoirs et à leur diffusion. Le savoir étant de nature liquide contrairement aux croyances.

J’aime les allégories. On va en faire une 😀

Il faut voir le flux de savoirs pareil à une rivière. Une rivière au courant plus ou moins fort. Les croyances sont les rocs plus ou moins imposants qui la jalonnent.

L’eau continue à couler en contournant les rocs. Mais à mesure, l’érosion et la force du courant font leurs oeuvres. Le roc s’effrite jusqu’à se disloquer puis disparaître.

De nouveaux rocs se forment également avec la sédimentation. Ce processus dans lequel des particules de matière cessent progressivement de se déplacer pour s’accumuler en couche et s’incruster.

Ainsi de suite …

L’intérêt d’opposer les croyances et les savoirs sert surtout à les distinguer. Nous ne pouvons apprendre les savoirs comme des croyances et des croyances comme des savoirs. Du Phillipe Merieu dans le texte.

Les savoirs sont réfutables, temporaires, incomplets et certainement pas absolus. Il faut les prendre et les transmettre comme tels. Ils représentent ce que l’on sait.

Les croyances ne sont pas des savoirs. Ils ne peuvent donc être placés sur un même plan. Les croyances ne sont pas forcément liées au religieux ou à la morale. J’ai pris cet exemple extrême pour mieux illustrer mon propos. Les croyances peuvent également être issues d’expériences répétées. Par exemple, suivre des processus et répéter  des pratiques juste parce qu’on nous dit de le faire. 

Si nous les remettons pas en question, elles deviennent des croyances par définition. Elles représentent ce que l’on croit. Autrement dit, la foi.

Pour ces raisons, les croyances sont durs à désapprendre. Pour ces raisons, il est dur de désapprendre.

Faut-il rappeler la position de l’Eglise sur l’Héliocentrisme, le fait que la Terre autour du soleil et non l’inverse ? Ou encore sur l’origine des espèce de Charles Darwin ? Il a fallu et il faut encore un effort de désapprentissage énorme pour recevoir et transmettre ces nouveaux savoirs.

En parlant de croyance, nous serions tentés de dire qu’il s’agit plus de décroire que de désapprendre. Dans ce contexte, j’entends le fait de désapprendre, comme pour son antonyme apprendre, qu’il suggère un effort. Décroire donne plutôt l’intuition de quelque chose d’instantané. Ce qui n’est pas tellement le cas.

Désapprendre en deux temps : le sens et la relativité

Désapprendre une croyance peut prendre du temps. Cependant, j’ai deux manières simples mais pas forcément faciles pour désapprendre plus rapidement. La première consiste à introduire du sens et la seconde, de la relativité.

Le sens
La meilleure manière d’introduire du sens dans ce que l’on fait ou ce qu’on dit, c’est certainement de se poser la question :

Pourquoi ?

Pourquoi je fais ça ?
Pourquoi je pense ça ?

Cela permet de revenir aux sources de notre apprentissage et découvrir s’il est biaisé. En effet, expliciter, avec ces propres mots, ce qui fonde nos évidences est la meilleure manière de savoir si l’on est sous l’emprise de l’effet Dunning-Kruger.

L’effet Dunning-Kruger est un biais cognitif selon lequel moins on en sait sur un sujet, plus on surestime notre connaissance de ce sujet. En poursuivant le raisonnement, ce que l’on sait au final tient plus des croyances que des savoirs.

Ce biais est également appelé biais de surconfiance. Charles Darwin fut le premier a en avoir l’intuition. Selon lui, l’ignorance engendrait plus fréquemment la confiance en soi que ne le faisait la connaissance.

Il y a des effets subsidiaires à ce biais :

La personne ignorante tend à surestimer ce qu’elle sait ;
La personne ignorante ne parvient pas à reconnaître ceux qui savent véritablement ;
La personne ignorante ne parvient pas à évaluer son niveau d’ignorance ;
Si la personne est amenée à améliorer, de manière significative, ses connaissances, elle pourra alors reconnaître et accepter ses lacunes antérieures.

Introduire du sens avec le «Pourquoi ?» est, selon moi, un exercice habile pour faire progresser ses connaissances et réduire ses croyances.

Faisons un test simple :

Pourquoi la Terre tourne t-elle autour du soleil ?

Si tu es en mesure de bien l’expliquer, sans recourir à internet tout de suite, bien sûr, alors tu sais. Sinon, c’est une croyance. Par contre, te renseigner à ce sujet et le retransmettre le rendra à nouveau savoir.

En définitive, donner du sens permet de se réattribuer le savoir. Il faut également rappeler son caractère éphémère et relatif.


La relativité
Dans le dictionnaire de la langue philosophique, Paul Foulquié et Raymond Saint-Jean, décrivent la relativité, entre autre, comme le caractère attribué à la connaissance humaine parce qu’elle est imparfaite, limitée.

Comme je l’énonçais précédemment nos savoirs sont tous réfutables. Il suffit de te montrer une banane rouge pour que tu arrêtes de croire que toutes les bananes sont jaunes (Histoire vraie*).

J’ai trouvé une manière pour mettre de la relativité dans nos savoirs. Elle consiste à terminer toutes assomptions par l’adverbe de temps « … pour l’instant. »

Faire systématiquement cet exercice, c’est le meilleur moyen de se préparer à désapprendre n’importe quel savoir. Nous l’ancrons dans un présent afin d’éviter de l’ancrer dans nos croyances. S’il est vrai aujourd’hui, il peut ne plus l’être demain.

Par ailleurs, je trouve que cela nous projette dans des hypothèses alternatives, créatives et originales. Pour reprendre l’exemple précédent :

La Terre tourne autour du soleil… pour l’instant.

Le « pour l’instant » nous invite à imaginer d’autres systèmes ou de nouvelles façons de les concevoir. Bien sûr, il ne s’agit pas de s’affranchir de tous ce que nous savons. Le faire, c’est faire de la science-fiction.

Non.

Il faut garder certains fondamentaux au préalable. Ils sont essentiels à l’imagination pour engendrer potentiellement de nouveaux savoirs. Ici, ce peut être, par exemple, les lois de la gravitation.

Albert Einstein est sorti de l’Ether, considéré comme élémentaire par les scientifiques de l’époque, pour entrer dans la théorie de la Relativité justement par cette voie. La gravité de Newton était basée sur un temps universel. Elle était donc incompatible avec la relativité restreinte, il fallait changer ça. C’est ce qu’il fit avec un certain panache.

Einstein nous rappelle l’importance de l’imagination. Elle est pour lui davantage importante que la connaissance. Nombre d’entre nous n’avaient pas forcément le contexte pour interpréter cette idée.

Maintenant c’est fait !


En conclusion, désapprendre, ce n’est pas compliqué. Du moins, pas comme on l’entend. Une fois distingué nos savoirs de nos croyances, ce sont surtout ces dernières qu’il faut désapprendre plus que décroire.

Il doit surement exister des manières multiples de désapprendre. Commencer par mettre du sens et de la relativité, c’est un bon début. Ceci dit, le désapprentissage doit se maitriser. Alvin Toffer, dans le Choc du Futur, nous interpellait en nous révélant les analphabètes du XXIe siècle. Ils ne seront pas ceux qui ne savent ni lire ni écrire. Ce seront ceux qui ne savent pas apprendre, désapprendre et réapprendre.


Et voilà ! C’était ma théorie sur le fait de désapprendre. Qu’en penses-tu ? T’as une autre théorie ? Ou peut être d’autres manière de désapprendre ? Vas-y partage-nous ça ! Ça fait du bien ! 😀

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